ACCESSOIRE – Bridgestone, les tests Mototribu des pneus Battlax T32 et GT par Philippe Chanin : de la colle pour le Sport Touring

Fort de son T31 sur le segment concurrencé du pneu routier polyvalent, Bridgestone hausse le ton et la barre avec le T32 annoncé comme toujours plus efficace en conditions délicates. Durabilité accrue et équilibre préservé comptent parmi ses autres atouts. Nous l’avons testé dans les Pouilles, au sud de l’Italie.
Par : Philippe CHANIN – Photos : Bridgestone
 

 
Plus qu’une évolution, le Battlax T32 est un nouveau pneumatique destiné aux roadsters, trails routiers et machines de tourisme.

Pour les motos les plus lourdes, Bridgestone propose une version GT adaptée.
 

 
Rendez-vous aux environs de Bari pour la conférence de presse ventant les qualités de la nouvelle enveloppe.

Tout a été upgradé : carcasse, procédés moléculaires et sculptures des gommes. Nous jugerons demain sur pièce !
 

 
Afin de ne pas regrouper des dizaines de journalistes en un même lieu, le manufacturier japonais a opté pour la solution originale d’une présentation itinérante scindée en cinq groupes.

Le premier est parti de Sicile, le dernier parviendra à Florence au terme d’un périple de 4 000 km.

Notre groupe, le second, naviguera entre Pouilles et Calabre dans une région peu courue des touristes.
 

 
Je roulerai avec un Espagnol, un Belge et un Italien. C’est ça l’Europe !

Après une agréable soirée dans un hôtel de charme, nous voici à pied d’oeuvre.

Au programme de ce premier jour, un peu plus de 400 km au guidon de moyennes cylindrées « légères » : BMW XR 900, Kawasaki Z 900 RS, KTM DUKE 890 et Yamaha Tracer 900, toutes chaussées des nouveaux T32 commercialisables en juin 2021.
 

 
Le bal s’ouvre sous le soleil, avec un vent chaud, sur une route côtière.

J’opte pour le roadster rétro de Kawasaki.

Les premiers kilomètres ne sont que ligne droite entrecoupées de rond-points ; l’occasion de valider l’excellente stabilité de la Z 900 équipée des T32.

Très vite, l’ambiance change sur une route vallonnée au revêtement luisant.

Barbara, notre ouvreuse française, accélère le train.
 

 
La neutralité de ma moto fait mouche.

Répondant au doigt et à l’oeil, celle qui pourrait passer pour une vieille (mais belle) peau cache parfaitement son jeu.

C’est en réalité une boule de nerfs qu’on inscrit facilement en virage sans que son train directeur survire ni se montre rétif.

Voulu souple en son centre sans trop se déformer sur les flancs, le pneu avant absorbe les irrégularités d’un revêtement passant sans prévenir de billard à défoncé.
 

 
L’Italie cultive les contrastes jusque dans son réseau routier, c’est aussi ce qui fait son charme.

Si le T32 avant épouse particulièrement bien le sol, l’arrière offre une surface de contact accrue pour passer la puissance ou suivre les longues courbes dans un séduisant accord.

Cette particularité a d’ores et déjà séduit Yamaha et MV qui ont choisi le nouveau Bridgestone pour monte d’origine des MT9 Tracer GT et Tourismo 800 Veloce.

Nous n’en saurons pas plus des tractations en cours avec les autres constructeurs…
 

 
 
Un pneu à tout faire

Comme la Z 900, le T32 est authentique, il ne triche pas.

Les gens de Bridgestone nous affirmaient hier avoir travaillé dans le sens d’un feedback (renvoi d’informations) linéaire permettant au pilote de conserver toute la maîtrise de sa conduite.

Pour Fabian François, responsable ingénierie des produits motos de la marque, l’époque est au changement.

« Autrefois, des sport-touring comme la Suzuki Bandit ou la Honda VFR étaient bâties sur un même concept.

S’y ajoutent aujourd’hui les nouvelles générations de SUV sur deux roues que sont les trails-routiers, bien plus routiers que trails.

Nos pneus doivent conjuguer avec la définition des motos traditionnelles et celui de sauterelles aux débattements élevés offrant peu d’appui sur l’avant ».

Un casse-tête pour beaucoup.
 

 
Revenons sur les routes des Pouilles où un ruban d’asphalte chaotique à souhait monte à l’assaut de Craco, un village fantôme déserté par ses habitants, depuis aussi longtemps que des services de la voirie.

Paysages arides, ambiance western. Peux touché par la modernité, le talon de la botte, comme on nome l’extrémité sud de l’Italie, a su demeurer tel qu’aux siècles derniers.

Ceux qui y vivent déplorent qu’il soit une région délaissée, certainement la plus pauvre du pays.
 

 
Nombreux sont les ponts qui enjambent les vallées.

Des ponts tout en courbes rapides que j’avale maintenant au guidon de la Tracer GT.

Le bouillonnant tricylindre de la Yamaha et sa partie-cycle confortable ne mettent pas plus à mal le comportement des T32.
 

 
En passant sur la BMW, je découvre aux antipodes une moto dynamique, au châssis raide et au moteur rugueux, peu adaptée aux routes exigeantes.

Malgré mes tentatives de déstabilisation, les pneus n’en auront que faire.

Jamais ils ne manifesteront quelconque mécontentement.
 

 
A Matera, les impressionnantes carrières de tuf disputent la vedette aux ruines de la ville antique auxquelles ont été accolées des bâtiments modernes du plus mauvais effet.

Souvenez-vous des contrastes… Le T32 en offre beaucoup moins.

Dans un lopin de planète peu fourni en radars de tous genres (chuuut), il colle tout aussi bien à l’esprit de la Duke qui s’en donne à cœur joie.
 

 
Agilité respectée, grip optimal.

On cherche toujours ses failles…

Le tracé se poursuit sur des tronçons rapides, très rapides, avant de revenir à des routes étroites bordées de murs de pierres qui redonnent envie de jouer.
 

 
On en oublierait que, comme le régime d’un moteur, les pneumatiques ont une indissociable limite tant ces Bridg, en tous lieus et toutes conditions, mettent le motard en confiance.

Mais sur le mouillé direz-vous, puisque c’est parait-il un des points forts ?

Patientez, la pluie est annoncée pour demain.
 

 
Nous aurons l’occasion de tester l’adhérence programmée encore meilleure que celle de l’ancien modèle et la technologie Pulse Groove qui combine comme un effet Venturi des sculptures aux motifs en forme d’impulsions successives à de petits déflecteurs centraux permettant de répartir la circulation de l’eau sur la surface du pneu en accélérant son évacuation. CQFD.

D’ici-là, je pars me coucher : ces neuf heures de selle(s) m’ont franchement épuisé.

Pas de quoi entamer la longévité du nouveau Battlax Sport Touring accrue de 10 %, mais sûrement la mienne !
 

 
 
Naissance d’une référence ?

Ce matin, nous découvrons les motos mouillées par l’orage de la nuit sous un vent faisant circuler les nuages qui ne s’épanchent plus sur les pauvres terriens.

Les conditions sont idéales, sinon pour le touriste, pour l’essayeur en mal de sol glissant avide de tester les nouveaux Bridgestone dans leur domaine de prédilection. Enfin, un des domaines…
 

 
Cap sur la pointe basse de la péninsule dont les paysages sauvages évoquent immanquablement l’Irlande.

Les goudrons toujours plus lisses luisant sous les phares des équipages seront nos camarades de jeu matinaux.

Aujourd’hui, notre demi-groupe (les essayeurs ont été séparés en deux dès leur arrivée pour limiter les risques de transmission) a, à sa disposition, de gros calibres pour lesquels ont été développés une version GT du T32.
 

 
Le staff technique nous en a expliqué les spécificités.

Pour convenir à des motos lourdes comme les BMW R 1250 RT, S 1000 XR, Kawasaki Versys 1000 ou Yamaha MT9 Tracer GT qui nous sont proposées, le T32 GT avant possède toujours une carcasse à deux plis, mais il voit sa ceinture en acier remplacée par une ceinture kevlar augmentant sa rigidité.
 

 
On constate que les sculptures sont moindres afin de limiter les déformations de gomme et préconiser la stabilité.

A l’arrière, les ingénieurs ont ajouté à la ceinture d’acier une couche supplémentaire en polyester chargée de rigidifier la carcasse.

Les saignées sont limitées pour stabiliser les hautes vitesses.

Rien n’a été laissé au hasard.
 

 
Justement, les gouttes refont leur apparition.

Redoublons d’attention, car les pièges sont nombreux.

Ceux des routes rapiécées (ou pas), des chiens enragés qui traversent sans prévenir pour mieux nous courser ensuite, des traînards dans leurs autos hors-d’age roulant sans raison apparente à 30 km/h sur d’interminables bouts droits et des véhicules garés n’importe où dans les rues des villages.
 

 
Bien calé derrière le pare-brise de la BMW RT dont j’ai extrait mes vêtements étanches des sacoches, je fends la pluie fine comme Moïse la mer Rouge.

Séance photos : la route est de plus en plus glissante.

Bien que la surface de contact au sol du pneu arrière plus largement rainuré soit augmentée de 13 %, nous roulons sur des œufs.

Un drone attend plus loin pour des images encore plus saisissantes.

Cloué au sol par les éléments, il ne pourra finalement décoller.
 

 
 
L’expérience a du bon

Devant nous, une vieille Fiat Panda (sans ABS) qui vient de tirer droit va s’échouer contre un petit muret.

Surprise mais pas décontenancée, Barbara écrase les freins à l’entrée du virage.

Sa MT7 ne bloque pas les roues, ne perd pas adhérence.

Notre chef de file serre les fesses : ça passe !
 

 
L’argument de Bridgestone annonçant une distance de freinage réduite de 7 % (par rapport au T31) en conditions humides ne parait pas surfait.

Les technologies modernes au service de la sécurité ont décidément, fait d’incroyables progrès.

C’est ce que m’expliquait Fabian François qui coiffe également le poste de manager du département Racing. « Les interactions entre la compétition et la route vont dans les deux sens ».

Lorsqu’on voit l’angle pris par les pilotes en course sur le mouillé, on est plutôt rassurés !
 

 
 
Pour toutes les catégories

La grosse Versys, avec ses suspensions onctueuses, analyse et digère un bitume de moins en moins régulier et glissant.

Certes, sur les portions rapides sa tenue de cap demeure perfectible, mais à CX imparfait aucun manufacturier n’est tenu de remédier.

« Nous avons beaucoup travaillé sur ces motos longues et lourdes que sont les maxi-trails ».

Bridgestone, qui leur a spécialement dédié un pneu avant 19 pouces, a conçu un « GT » en taille 170 x 17 possèdant une courbure plus marquée afin d’améliorer la vivacité tout en préservant la linéarité.

Le T32 GT se superpose, sur le segment trail routier au A41 qui demeure au catalogue.

Il est de même pour le T31 voué à un plus large éventail de modèles, qui abandonnera prochainement son étiquette (et le tarif) Premium au profit du T32 standard.
 

 
A cadence plus raisonnable, la « douce » Kawasaki me laisse le temps d’analyser les singularités du coin : son absence notable de centres commerciaux, ses maisons en construction depuis longtemps commencées mais jamais terminées, ses sites archéologiques remarquables toujours en friche, ses stations-service pour la plupart abandonnées.

On en viendrait à penser qu’une guerre est passée par là.

Au bout du bout de la péninsule, l’excuse d’un café ristretto sous le phare monumental de Santa Maria di Leuca nous invite à nous mettre à l’abri.
 

 
A peine ressortis, le soleil pointe ses rayons à travers les nuages.

Nous reprenons la pist… pardon, la route qui sèche rapidement. Direction plein ouest.

Je remarque, souvent à l’entrée des stations service encore ouvertes, un panneau + 25 c.

C’est le prix à payer pour qui ne veut pas se salir les mains en faisant appel au pompiste.
 

 
Les portions d’autoroute et petites routes parfumées s’enchaînent comme dans un film jusqu’à la vallée d’Itria.

Je pilote maintenant, dans un registre éminemment sportif, une S 1000 XR.

La BMW virevolte entre les champs d’oliviers et les rangées de cactus auxquelles j’éviterais de me frotter.
 

 
Cette moto est un arme de gros calibre à laquelle les T32 confèrent une tenue et une précision extrêmes.

Confiance, c’est le mot qui me vient en tête pour qualifier ce nouveau Battlax qui a aucun moment ne m’aura donné de frayeur malgré des conditions pas toujours évidentes.
 

 
La fin de journée approche, nous parvenons à Alberobello, terme de notre very good trip.

Ce village immaculé classé au patrimoine mondial de l’Unesco est parmi les plus beau d’Italie avec ses trulli, des maisons atypiques coiffées de toits en forme de cônes.

Nous y achèverons le périple, laissant à d’autre le plaisir de remonter vers le nord « à bord » des T32.

Arrivederci, alla prossima !
 

 
 
Tailles Bridgestone Battlax T32

Pneu avant : 110/70 ZR17, 110/80 R18, 110/80 ZR18, 110/80 R19, 120/60 ZR17, 120/70 ZR17, 120/70 ZR18, 120/70 ZR19
Pneu arrière : 140/70 R18, 150/70 ZR17, 160/60 ZR17, 160/60 ZR18, 160/70 ZR17, 170/60 ZR17, 180/55 ZR17, 190/50 ZR17, 190/55 ZR17