VOYAGE – aux portes du Tibet, un récit de Jacques Liautard, épisode 10, Kaza

Jacques Liautard nous a confié son carnet de voyage en Inde aux portes du Tibet en moto, voici le récit et les photos de ce périple.
 

 
 
Samedi 22 septembre 2018 Kaza

Pluie toute la journée, froid.

Je me réveille de temps en temps dans la nuit, la couette est lourde et une fois réchauffé, j’enlève les deux couvertures que j’avais superposé.

Je somnole jusqu’à 07h45 en essayant de respirer normalement, je sens bien que nous sommes en altitude.

J’arrive à régler la douche sans me brûler ni me geler puis je vais au restaurant.

C’est la ruée sur le buffet, les serveurs viennent tout juste d’apporter les plats.

Il est un peu plus de 08h alors qu’ils sont censés servir à partir de 07h30.

Œufs au plat demandés au serveur, thé, fruits frais, toast et confiture, ça ira très bien pour ce matin.
 

 
Je n’ai pas vraiment jeté un coup d’œil au temps, j’ai vu qu’il était couvert mais je pensais que c’était plutôt du brouillard.

En réalité, il a neigé de bonne heure et la neige s’est transformée en pluie.

Radjeev propose d’aller voir le temple en voiture plutôt qu’en moto d’autant que les deux prochaines étapes seront un peu plus difficiles que ce que nous avons connu jusqu’à présent.

Le départ est prévu à 10h sauf pour Charles-Antoine qui préfère rester tranquillement à l’hôtel.

Se pose juste le problème des vêtements de pluie.

Je n’ai pas prévu autre chose que la combinaison de pluie moto mais j’ai aussi un petit coupe-vent dans les sacoches.

Heureusement qu’hier j’ai mis les protections de pluie sur les sacoches sinon tout serait trempé à l’intérieur.
 

 
Je fais un saut aux motos garées en face de l’hôtel, une petite pluie froide me tombe dessus pendant que je récupère les gants mi saison, le tour de cou en polaire et surtout le coupe-vent qui me protégera de la pluie durant la visite du temple.

Retour à la chambre, c’est un peu sinistre, je n’ai pas envie de rester une heure à attendre.
 

 
Je vais dans le salon continuer le journal de bord.

La télévision est allumée et presque personne ne la regarde.

Peu après, Jean-Pierre me rejoint et feuillette les livres photos.
 

 
Nous partons à 10h dans un minibus.

Le chauffeur du 4×4 nous accompagne, assis au milieu de l’allée sur un tabouret en bambou.

Il pleut tout le long du trajet et les carreaux sont régulièrement embués mais ça ne semble pas gêner le chauffeur qui n’essuie que devant lui.

Nous reprenons la route d’hier et Jean qui se trouve côté précipice change de place avec Gervaise pour être au milieu, vertige oblige.
 

 
Nous croisons quelques véhicules parfois de très près.

Tous les trous de la chaussée sont remplis d’eau boueuse.

Après une heure de route, nous arrivons au monastère Dankhar situé à 3700m au-dessus d’un petit village accroché à la montagne.
 

 
 
Un peu d’histoire

Dhankar Gompa est un village et aussi un Gompa, un temple bouddhiste situé dans le district de Lahaul et Spiti en Inde.

Il est situé à 3 894 mètres d’altitude dans la vallée de Spiti, au-dessus du village de Dhankar, entre les villes de Kaza et de Tabo.

Le complexe est construit sur un éperon haut de 1000 pieds (300 mètres) surplombant le confluent des rivières Spiti et Pin – l’un des décors les plus spectaculaires au monde pour une gompa.

Dhang ou dang signifie falaise, et kar ou khar signifie fort.

Dhangkar signifie donc fort sur une falaise.
 
le monastère
 
Dhankar, comme le monastère Key et le monastère Tangyud à Spiti, et les monastères Thiksey, Likir et Rangdum au Ladakh, ont été construits comme un monastère fort sur le modèle tibétain central.

Il aurait eu 90 moines en 1855.

Au-dessous de la Gompa se trouve le petit village de Shichilling qui abrite le nouveau monastère Dhankar, qui abrite environ 150 moines appartenant à l’école de bouddhisme tibétain Gelug.

Au-delà des rudes paysages lunaires environnants, Dhankar Gompa compte parmi ses sites remarquables une statue de Vairocana composée de quatre personnages assis dos à dos, ainsi que de nombreux thangkas en ruine.
 

 
Il y a un petit musée dans la gompa.

En 2006, le World Monuments Fund a choisi Dhankar Gompa comme l’un des 100 sites les plus menacés au monde.

Un groupe à but non lucratif, Dhangkar Initiative, tente d’organiser sa conservation.
 

 
Dhankar est accessible par une route carrossable, idéale pour les petits véhicules seulement, qui part de la route principale Kaza-Samdu à environ 24 km de Kaza.

La route secondaire a une longueur de 8 km jusqu’à Dhankar.

Une femme et son jeune garçon sont dans le monastère. Il faut retirer ses chaussures pour accéder à la salle de la divinité.
 

 
Malheureusement, le sol est mouillé, les chaussettes ont vite fait d’être imprégnées d’eau.

Il est marqué que le site est sous surveillance vidéo, effectivement, nous voyons une caméra et qu’il est interdit de photographier.

Personne ne tient compte de l’interdiction.
 

 
Jean et moi faisons une offrande, 500 roupies pour lui et 10 pour moi.

Nous quittons le temple accompagné par quelques chiens au pelage mouillé.

De nombreux chiens courent en liberté dans tous les villages que nous avons traversé.

Cette nuit, c’était un festival d’aboiements.

Avant de repartir, nous allons dans un bar boire thé noir, tchai et ginger lemon.
 

 
De retour au minibus, nous avons une bonne heure de route avant d’arriver à l’hôtel.

Agnès prend des photos depuis la fenêtre ouverte du véhicule en mouvement.

On a parfois l’impression que c’est plus de la neige fondue qui tombe que de la pluie.
 

 
Peu avant d’arriver, nous nous arrêtons dans un hangar marqué « Grease Motorcycle Club ».

Les trois indiens qui s’y trouvent semblent étonnés de voir débarquer 10 personnes.

Ca n’est pas un moto club mais juste un magasin de réparation moto.
 

 
Nous sommes à l’hôtel à 13h. Soupe, mouton avec os, riz, naan et un plateau de crudités pour le repas de midi.

Après le repas, tout le monde regagne sa chambre.

Il continue de pleuvoir.

Je vais voir si je trouve une boutique pour acheter des chaussettes plus chaudes voir même une doudoune.

Un panneau Decathlon un peu plus bas faisant naitre l’espoir.

Je marche un bon moment à 2 à l’heure sans rien trouver d’autre que de petites boutiques d’alimentation.

Je sens l’altitude me fatiguer et fais attention à ne pas trop forcer.

Je croise un indien et lui demande où se trouve le magasin Decathlon, il me montre le bâtiment mais m’indique qu’il est fermé jusqu’à 16h comme nous l’avait dit Radjeev.
 

 
Je repasse devant les 4 stupas et leurs moulins à prière et regagne l’hôtel.

Je me suis légèrement réchauffé en marchant mais je n’ai malgré tout pas bien chaud.

J’appréhende les trois jours suivants qui vont être encore plus froids dont la deuxième nuit sous la tente sans eau chaude.

Je récupère ma combinaison de pluie dans les sacoches, Atul dors dans le pickup, il ne doit pas y faire chaud non plus!

Dans la chambre, j’utilise le sèche-cheveux pour sécher ce qui est mouillé ou humide mes chaussettes de ce matin, mes bottes, un peu le pantalon puis je regarde un épisode de greys anatomy dans le lit sous la couette.

Malgré ça, je sens des frissons de froid dans le dos.

Vers 16h30, je fais l’effort surhumain d’aller voir si Decathlon est ouvert mais il est toujours fermé.

Je me recouche et je somnole jusqu’à ce que j’entende Jean.

Je me lève d’un bond et vais lui demander dans le salon s’ils ont trouvé des magasins.

Effectivement, il y a le main market un peu plus bas dans la ville.

Ils ont acheté des bonnets et des sacs pour fabriquer des manchons pour ne pas avoir les gants mouillés demain.

Je repars une fois de plus dans le village, cette fois ci nettement plus loin.

Je passe devant deux endroits où de grandes flammes sortent de braseros autour desquels des jeunes se réchauffent en discutant.

A chaque fois, je demande si le main market est bien par là.

Dans la descente, je marche à peu près normalement, je sais que la montée sera nettement plus difficile.
 

 
J’arrive enfin devant une boutique qui vend des vêtements.

Je demande des chaussettes chaudes, la vendeuse me propose des chaussettes typiques indiennes en laine.

Pour mesurer la taille, je pose mon poing fermé sur le pied de la chaussette et la vendeuse referme la chaussette sur ma main.

200 roupies la paire, j’en prends deux paires, je verrai bien si elles me vont et si elles me tiennent chaud.

Je demande ensuite une doudoune mais il n’y a pas ma taille.

Qu’à cela ne tienne, la vendeuse me propose de suivre son fils d’une dizaine d’année jusqu’à une grande boutique où je trouverai tout ce que je veux.

Le gamin est pied nu dans des sandales en plastique et pas très chaudement vêtu, il se protège de la pluie avec un sac plastique sur la tête.
 

 
Nous grimpons jusqu’à la grande route et le fameux grand magasin n’est rien d’autre qu’un magasin de souvenirs sans doute tenu par le mari de la vendeuse.

Ils n’ont rien à me proposer, je rebrousse chemin et retourne dans le main market.

Je demande à gauche et à droite lorsque je vois des petites échoppes avec des vêtements, je passe devant le barbier et prends en photo Charles-Antoine en train de se faire faire la barbe et j’arrive devant une boutique nettement plus fournie que les autres.

De nombreuses doudounes sont accrochées.

J’essaye les deux plus grandes qui sont marquées xxl, c’est la première fois que je prends cette taille-là.

J’aurais préféré la noire mais la bleue est plus grande, ça fera l’affaire.

1800 roupies, je ne discute pas le prix.

Je demande si le vendeur a un caleçon pour mettre sous le pantalon de moto.

Il fouille partout, ne trouve rien et m’indique d’aller dans une autre boutique tenue par sa femme un peu plus bas.
 

 
Mais entre temps, un jeune homme arrive qui me sort un caleçon taille 9. Je n’ai aucune idée de la taille, la longueur semble bonne, je règle 300 roupies, prix d’ami au lieu de 330.

Comme j’ai toujours un doute sur les chaussettes et que ce magasin n’en propose pas, je vais, accompagné du jeune homme dans l’autre magasin qui vend des chaussettes en laine identiques à celles que j’ai acheté pour 250 roupies.

Il ne reste que trois jours de froid, avec mes deux paires et celles que j’ai apporté, ça devrait aller.

Il ne reste plus qu’à retourner à l’hôtel. Je marche au ralenti, j’ai l’impression que chaque pas est un effort.

J’arrive enfin dans la chambre et j’utilise le sèche-cheveux pour de nouveau sécher les chaussettes et le pantalon.

En séchant les baskets, je fais trop chauffer l’appareil qui s’arrête.

J’espère que ça n’est qu’un fusible temporaire et qu’il va re-fonctionner car il me reste la deuxième chaussure à sécher.

Je n’ai pas envie de mettre dans la valise des affaires mouillées.

Je déballe les affaires achetées au village mais n’ai pas envie de les essayer tout de suite.

Je refais le lit car personne n’est venu faire la chambre et je m’allonge sous une couverture pour continuer le journal de bord.

J’ai toujours des frissons de froid, je ne sais pas dans combien de jours j’arriverai à me réchauffer!

Le dîner est prévu à 20h, il est un peu plus de 19h.

Je regarde le début du film sur le Bol d’Or Classic 2014 car je n’ai gardé que greys anatomy et j’ai jeté tous les autres films pour faire de la place…
 

 
A 20h je vais rejoindre tout le monde dans le salon suivi de peu par Sylvain.

Radjeev nous annonce que le col par où nous devions passer est fermé, il y a 30cm de neige donc impossible de continuer jusqu’à Manali comme prévu.

Il y a différentes solutions mais suivant le temps qu’il fera demain matin, peut-être ferons nous un aller et retour au monastère puis retour en 4 jours à Shimla d’où nous prendrons le bus pour retourner à New Delhi.

La météo prévoit de la pluie pour le restant du séjour.

Jean s’est fabriqué ses manchons avec des sacs achetés au main market, je pense que l’exemple sera suivi demain pour ne pas rouler gants mouillés.

Il est l’heure de passer à table.

Soupe, riz, nouilles végétales, poulet et sorte de custard en dessert.

Nous demandons au serveur s’il est possible d’avoir des fruits, il nous apporte des bananes, ça change un peu de manger des fruits.

A 21h tout le monde regagne les chambres, nous avons rendez-vous entre 07h30 et 08h30 pour le petit déjeuner et un départ à 09h suivant l’option choisie.

Ce matin, les serveurs ont préparé le buffet à 08h.

Je tape la fin du journal, regarde un épisode de greys anatomy et vais éteindre de bonne heure.

à suivre…